Dans un mouvement historique de souveraineté bancaire, le Sénégal se prépare à racheter la filiale locale de la Société Générale pour 268 millions d’euros. Cette révélation majeure du quotidien Les Échos intervient dans un contexte de retrait massif des banques françaises du continent africain.
L’opération, suivie personnellement par le président Bassirou Diomaye Faye, vise à doter l’État sénégalais d’un « bras armé financier » pour stimuler l’économie nationale. Selon le journal français, ce rachat du deuxième acteur bancaire du pays a un double objectif : soutenir les investissements publics et développer les PME locales, qui ne captent actuellement que 10% des crédits accordés aux entreprises.
Cette acquisition s’inscrit dans une tendance continentale plus large. « Le retrait des banques françaises, qui étaient frileuses sur les crédits et visaient une clientèle plus aisée, va bénéficier au marché africain », analyse dans Les Échos Jamal El Mellali, expert de l’agence Fitch.
La Société Générale opère un repli général sur le continent. L’enquête du journal économique révèle qu’après avoir quitté le Congo, le Tchad, le Bénin, le Burkina Faso, le Mozambique et la Mauritanie, la banque vient d’annoncer son retrait de Guinée. La cession de ses filiales ivoiriennes est également programmée pour 2025.
Les chiffres expliquent ce désengagement : « Il est plus périlleux de prêter à des États, des entreprises ou des PME en Afrique qu’en Europe : le risque d’impayé est plus élevé », explique aux Échos Estelle Brack, experte des systèmes bancaires africains. L’Afrique ne représente que 7% du produit net bancaire de la Société Générale.
D’autres acteurs africains ont déjà pris le relais ailleurs sur le continent. La Coris Bank, fondée par le banquier Idrissa Nassa, a repris les filiales de la Société Générale au Tchad et en Mauritanie. En Côte d’Ivoire, elle a acquis la britannique Standard Chartered. De son côté, Vista Bank, dirigée par Simon Tiemtoré, promet dans Les Échos : « D’ici à 2026, nous serons présents dans 25 pays. »
Jean-Luc Olivier Akoto, ancien dirigeant de la BNP en Afrique, livre dans le journal un témoignage éclairant sur les difficultés ayant mené à ce retrait : « On devait faire face à un bashing permanent sur l’Afrique. On nous disait que c’était corrompu, que c’était impossible d’y faire du business… Tout cela a plombé notre stratégie sur le continent. »
Pour Estelle Brack, citée par Les Échos, ces rachats sont une opportunité : « Les banques françaises sont d’excellentes prises pour les banques africaines, elles sont généralement déjà performantes et très bien gérées. » Une vision qui semble conforter la stratégie sénégalaise de reprise en main de son secteur bancaire.
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